Vincenzo Montella, il aeroplanino


Davantage connu en tant qu’entraîneur, Vincenzo Montella fut pourtant l’un des meilleurs attaquants italiens entre la fin des années 90 et le début des années 2000. Il bénéficie même d’un statut de légende à l’AS Roma, club dont il a défendu les couleurs pendant près de dix ans. Malheureusement pour lui, le statut du club romain qui ne se qualifiait pas souvent pour la Champions League et la concurrence exacerbée en sélection, le confineront dans la confidentialité. Le fait d’avoir été, malgré lui, le lieutenant de Francesco Totti a également joué en ce sens. Résultat, cet attaquant de poche d’un mètre soixante-douze n’est resté que dans les mémoires des suiveurs de la Serie A.

Vincenzo Montella et Luciano Spalletti sous le maillot d’Empoli

Des débuts modestes

Vincenzo Montella voit le jour le 18 juin 1974 à Pomigliano d’Arco, une petite ville située dans la banlieue de Naples. Cependant, il ne portera jamais les couleurs du club campanais. Issu d’une famille modeste (père ouvrier, mère femme au foyer), il grandit à Castello di Cisterna, une petite bourgade de Campanie. C’est là qu’il s’initie au football de façon totalement informelle. Bien que relativement doué, il échappe aux recruteurs de Naples. Il est repéré par ceux d’Empoli à 13 ans. Il déménage alors dans la cité toscane pour y effectuer sa formation. Montella gravit les échelons des catégories de jeunes et intègre l’équipe première qui évolue alors en Serie C1 (troisième division italienne). Il effectue ses débuts professionnels lors de la saison 1990-1991. Lors de l’exercice suivant, il est plus régulièrement sollicité (quatre buts en sept matchs) en championnat. Durant cette période, il côtoie Luciano Spalletti. Le futur entraîneur évolue en effet comme milieu de terrain à Empoli. Lors de la saison 1992-1993, le jeune Montella commence à faire parler de lui en inscrivant six buts en treize matchs de championnat. Malheureusement, son élan sera brisé par une fracture du péroné puis une infection virale. Il sera éloigné des terrains plus d’un an et ne prendra pas part à la saison 1993-1994. Remis, il bénéficie d’un changement de statut dans l’équipe. Spalletti est en effet devenu l’entraîneur et il décide de faire de Montella son avant-centre titulaire. Le jeune attaquant le lui rend bien et plante 17 buts en 30 matchs. Empoli décroche la montée en Serie B (deuxième division). Après cette saison réussie, Montella fait l’objet de nombreuses convoitises.

Passages réussis au Genoa et à la Sampdoria

Empoli ne parvient pas à conserver son joyau. C’est le Genoa, pensionnaire à l’époque de Serie B, qui rafle la mise et s’attache les services du jeune attaquant à l’orée de la saison 1995-1996. Montella s’impose immédiatement à la pointe de l’attaque du club ligurien. Il inscrit 21 buts en 34 matchs de championnat et invente sa célébration mythique consistant à imiter un avion en vol (ce qui lui vaudra par la suite son surnom d’Il Aeroplanino). Ses bonnes performances attisent logiquement l’intérêt de clubs plus huppés. A l’intersaison 1996, Montella surprend tout le monde en s’engageant avec la Sampdoria, le grand rival du Genoa, qui évolue alors en Serie A. En dépit des réserves liées à ce transfert, Montella continue sur sa lancée et fait oublier son prédécesseur Enrico Chiesa, transféré à Parme. Il plante 22 buts en championnat (un record pour un joueur qui découvre la Serie A) et deux autres en Coppa Italia (24 buts en 30 matchs TCC) pour sa première saison avec les Blucerchiati. Sa saison 1997-1998 est tout aussi réussie (20 buts en 33 matchs de Serie A, 21 en 39 matchs TCC) malgré les concurrences de Jürgen Klinsmann puis Giuseppe Signori. Pourtant, son profil ne convainc toujours pas le sélectionneur national Cesare Maldini qui ne le convoque jamais. Montella doit donc regarder le Mondial 1998 à la télévision. L’intersaison 1998 voit Spalletti arriver sur le banc de la Samp. Tout laisse penser que Montella brillera sous les ordres de son mentor, surtout qu’Ariel Ortega rejoint également le club. Malheureusement, rien ne se passera comme prévu. Spalletti sera viré en décembre 1998, remplacé par David Platt avant de revenir sur le banc en février 1999. La Sampdoria s’effondrera totalement et finira reléguée en Serie B. Dans ce marasme sportif, seul Montella aura surnagé (douze buts en Serie A). Logiquement, il se retrouve sur les tablettes des grands clubs italiens. De plus, il honore sa première cape en juin 1999.

La belle aventure romaine

Montella finit par accorder sa préférence à l’AS Roma. Il rejoint les Giallorossi durant le mercato estival 1999. Au sein d’une ligne offensive comptant Francesco Totti, Marco Delvecchio et le japonais Hidetoshi Nakata, Montella est comme un poisson dans l’eau dans la formation coachée par Fabio Capello. Il devient titulaire indiscutable et termine la saison en tant que meilleur buteur du club (18 buts en championnat, 21 TCC). Il est récompensé de ses bonnes performances par une sélection pour l’EURO 2000 aux côtés de Totti, Delvecchio, Filippo Inzaghi et Alessandro Del Piero. La Squadra Azzurra se hissera en finale mais s’inclinera contre la France dans un scénario rocambolesque. L’intersaison 2000 est marquée par l’arrivée d’un concurrent majeur: l’argentin Gabriel Batistuta. Montella se prendra le bec avec lui après avoir refusé de lui céder le numéro 9 (Batigol se rabattra sur le 18). Montella perd sa place de titulaire mais se montre tout de même décisif malgré son temps de jeu réduit (13 buts en 28 apparitions en championnat, 18 réalisations TCC). Il sera un des éléments déterminants dans la conquête du Scudetto. La Roma finit championne d’Italie pour la troisième fois de son histoire (son dernier titre de champion remontait à 1983). La saison 2001-2002 démarre sous de bons auspices. La Louve s’adjuge la Supercoppa Italiana en battant la Fiorentina (Montella inscrit un des trois buts). Malgré l’émergence du jeune Antonio Cassano, Montella s’impose comme le véritable concurrent de Batistuta. Frustré par son statut de remplaçant, il envisage un temps quitter le club avant de se raviser. Il finira la saison avec 13 buts au compteur pour 19 matchs de Serie A, affichant un des meilleurs ratio minutes jouées/buts inscrits, en plus du statut de meilleur buteur du club. Mieux, il entre dans la légende le 10 mars 2002 en inscrivant un quadruplé lors du derby de Rome, un record qui tient encore à ce jour. Il est retenu pour la Coupe du monde 2002 dans la foulée. Lorsqu’il retrouve les Giallorossi, pour la saison 2002-2003, il récupère sa place de titulaire (Batistuta finira par quitter le club lors du mercato hivernal). Malheureusement, il peine à retrouver l’efficacité et livre sa pire saison en Serie A (neuf buts en championnat, onze TCC mais surtout zéro but en Champions League malgré ses onze apparitions). Ses difficultés sont en partie liées à l’extra-sportif. En plein divorce, l’Aeroplanino a du mal à briller. Pour ne rien arranger, il accumule les pépins physiques. Conséquence, il ne joue qu’onze matchs de championnat (cinq buts inscrits quand même) lors de la saison 2003-2004 et perd sa place en sélection. A court de rythme, il ne sera pas retenu pour l’EURO 2004.

L’intersaison 2004 est marquée par le départ de Capello, remplacé sur le banc par Cesare Prandelli. Problème, ce changement de coach préfigurera une saison difficile. Une ribambelle d’entraîneurs se succèderont sur le banc (Prandelli, Rudi Völler, Luigi Delneri, Bruno Conti). Malgré ce méli-mélo, Montella retrouve de l’allant et brille de nouveau (21 buts en championnat, 23 TCC) malgré la concurrence de Cassano. Alors qu’on l’imagine retrouver sa plénitude, surtout que Luciano Spalletti est intronisé entraîneur durant l’intersaison 2005, les blessures reviennent l’embêter. Il est éloigné des pelouses suite à une opération du dos et de l’épaule. Pour ne rien arranger, Spalletti décide d’aligner Totti comme unique avant-centre dans un système à une seule pointe. Montella ne joue que treize matchs (un but) lors de la saison 2005-2006. La donne ne change pas lors de l’exercice suivant. Il ne foule les pelouses de Serie A qu’une douzaine de fois (trois buts inscrits) lors des six premiers mois de la saison. réalisant que son horizon est bouché, il consent à partir.

Prêts à Fulham puis à la Sampdoria

En janvier 2007, il quitte son pays natal pour la première fois à la faveur d’un prêt à Fulham. Ses débuts sont réussis avec un doublé contre Leicester City en FA Cup puis un but dès son premier match de Premier League. Malheureusement, le club londonien doit se battre pour le maintien. Après sept matchs sans victoire, le manager Chris Coleman est limogé en avril. Son remplaçant Lawrie Sanchez n’accorde pas de crédit à Montella et ne le fait pas jouer. A bientôt trente-trois ans, Montella ne représente plus l’avenir. Sanchez met fin à son prêt début mai et le buteur italien retourne en Italie après avoir laissé un bon souvenir chez les supporteurs de Craven Cottage (trois buts en dix matchs de Premier League, six en quinze rencontres TCC). Durant l’intersaison, Spalletti lui fait clairement comprendre qu’il ne compte plus sur lui. En désespoir de cause, Montella accepte un nouveau prêt. Il est cédé à la Sampdoria, son ancien club, pour une saison. Son deuxième passage à la Samp sera nettement plus mitigé. Venu avec l’assurance d’être titulaire, il ne peut s’installer durablement à la pointe de l’attaque à cause de ses nombreuses blessures. Il ne dispute que treize matchs de Serie A pour quatre buts inscrits. Il ne se montre pas plus à son avantage en Europa League (cinq matchs, un but).

Clap de fin à la Roma

De retour de prêt, Montella, désormais âgé de trente-quatre ans, semble plus que jamais sur le déclin. Mais suite au départ du brésilien Alessandro Mancini, Spalletti le convainc de rester au club. Devenu simple remplaçant derrière le monténégrin Mirko Vucinic, il n’est jamais titularisé lors de cette saison 2008-2009. En douze bouts de matchs en Serie A, il ne trouve jamais le chemin des filets. Ses trois autres apparitions dans les autres compétitions (Champions League et Coppa Italia) ne lui permettront pas non plus d’ouvrir son compteur-but. Après cette saison difficile, Montella décide d’arrêter les frais et annonce sa retraite le 02 juillet 2009 quelques semaines après avoir fêté ses trente-cinq ans. Dans la foulée, il se voit offrir un contrat de trois ans pour entraîner les jeunes de l’AS Roma. Il devient ainsi coach des U15 et débute sa seconde vie d’entraîneur.

En dépit de statistiques plus qu’honorables (il a inscrit plus de 230 buts dans sa carrière), Montella n’a pas eu la reconnaissance méritée. Rarement cité lorsqu’on évoque les meilleurs attaquants du début du XXIe siècle, il a plus ou moins payé sa fidélité à l’AS Roma (il a décliné toutes les propositions de clubs de meilleur standing lors de ses belles années) ainsi que sa relative discrétion avec la sélection italienne (trois buts en vingt sélections) où il est resté confiné au statut de remplaçant du fait de la rude concurrence (Vieri, Filippo Inzaghi, Del Piero, Totti, Delvecchio puis Cassano et Marco Di Vaio). Heureusement, la Roma a su honorer à sa juste mesure celui qui n’avait pas hésité à baisser son salaire lorsque le club traversait des difficultés financières (Totti et Christian Panucci étaient les seuls à en avoir fait de même). Il a été introduit au Hall Of Fame du club en 2013 et a même eu l’honneur d’entraîner brièvement les Giallorossi durant la saison 2010-2011 (il avait assumé l’intérim jusqu’en fin de saison suite au limogeage de Claudio Ranieri en février 2011).

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