Quand la Sampdoria était un grand d’Italie


Anonyme formation de milieu de tableau depuis l’aube du XXIe siècle, la Sampdoria fut pourtant l’une des meilleures équipes d’Italie dans les années 80 et 90 au point de rivaliser avec les deux clubs milanais (Inter et AC Milan) pour le titre et faire bonne figure sur la scène européenne. Redoutable équipe de coupe, la formation génoise a marqué cette époque qui fut la meilleure de son histoire. Revivons cette période faste où la Samp était une formation majeure.

Roberto Mancini, Gianluca Vialli et Graeme Souness

La construction

Rachetée par l’homme d’affaires Paolo Mantovani en 1979 alors que le club végétait en Serie B (D2 italienne), la Sampdoria accède à l’échelon supérieur en 1982. Mantovani n’hésite pas à casser sa tirelire pour renforcer son équipe. Dès la saison 1982-1983, il recrute l’attaquant anglais Trevor Francis (Manchester City), le milieu irlandais Liam Brady (Juventus Turin) et un jeune attaquant alors totalement inconnu, Roberto Mancini, qui arrive de Bologne. Les années suivantes sont marquées par les recrutement des défenseurs Pietro Vierchowod (AS Roma) et Roberto Galia (Côme), du milieu Fausto Pari (Parme) et du gardien international Ivano Bordon (Inter Milan). Grâce à ces renforts, le club se montre compétitif et finit sixième de Serie A à l’issue de la saison 1983-1984. Malgré le départ de Brady pour l’Inter Milan, l’équipe poursuit sa construction avec les arrivées du milieu écossais Graeme Souness (Liverpool FC), du jeune latéral droit Moreno Mannini (Côme) et de l’avant-centre Gianluca Vialli (Cremonese). Ce dernier et Mancini afficheront rapidement leur complémentarité (ils seront vite surnommés les Jumeaux du but) et deviendront progressivement les leaders de l’attaque génoise. La Samp réalise une belle saison 1984-1985 sanctionnée par une quatrième place en championnat mais surtout une belle épopée en Coppa Italia où elle atteint la finale. Vainqueur de la double confrontation contre l’AC Milan (1-0 ; 2-1), le club remporte son premier titre majeur.

Toninho Cerezo (Photo de Neal Simpson/EMPICS via Getty Images)

L’ascension

Ce succès-surprise ouvre les portes de l’Europe à la Samp pour la première fois de son histoire. L’aventure sera malheureusement brève (élimination en huitièmes de finale par le Benfica Lisbonne). En championnat, la saison sera plus que décevante, l’équipe finissant à une décevante douzième place. Heureusement, le club brille en Coppa Italia et atteint de nouveau la finale. Cette fois, les hommes d’Eugenio Bersellini s’inclinent contre l’AS Roma (2-1 ; 0-2). Déçu, le président Mantovani décide de faire des changements à l’intersaison. Il met fin à sa collaboration avec Bersellini et confie les rênes de l’équipe au coach yougoslave Vujadin Boskov. Francis, Galia, Bordon et Souness quittent le club. Leurs départs sont palliés par les arrivées de l’allemand Hans-Peter Briegel (Hellas Vérone), du brésilien Toninho Cerezo (AS Roma) et du jeune gardien Gianluca Pagliuca (Bologne). Avec l’addition de futurs bons joueurs de Serie A (Luca Fusi, Mauricio Ganz, Antonio Paganin…) et la confirmation du duo Vialli-Mancini, le club sevré d’Europe squatte le premier tiers du tableau. Il finit cinquième ex aequo avec l’AC Milan et doit disputer un barrage contre les Rossoneri pour décrocher une place en coupe de l’UEFA. Ils s’inclinent malheureusement. La saison suivante sera plus réussie avec une quatrième place en championnat et une nouvelle victoire en Coppa Italia (succès contre le Torino (2-0 ; 1-2)) ce qui lui permet de retrouver l’Europe.

Attilio Lombardo. (Photo de Professional Sport/Popperfoto via Getty Images)

La confirmation

Après cette saison satisfaisante, l’équipe se renforce de nouveau avec les arrivées de l’expérimenté Giuseppe Dossena (Udinese) de l’espagnol Victor Muñoz (FC Barcelone) et du jeune Amedeo Carboni (Parme). Ils font oublier les départs de Briegel, Ganz, Paganin et Fusi. Le club finit la saison 1988-1989 à la cinquième place de Serie A. Mais c’est en coupes qu’il brille. Il parvient à se hisser en finale de coupe des vainqueurs de coupe mais s’incline contre le FC Barcelone (0-2). Il se montre plus verni en Coppa Italia où il remporte de nouveau le trophée en triomphant du Naples de Maradona (0-1 ; 4-0). L’exercice suivant est du même acabit. Le club qui a enrôlé Attilio Lombardo (Cremonese), Giovanni Invernizzi (Côme) et le yougoslave Srecko Katanec (VFB Stuttgart) à l’intersaison finit cinquième pour la deuxième fois consécutive. Si la campagne en Coppa Italia est cette fois infructueuse, on ne peut en dire autant de l’aventure européenne. La Sampdoria remporte la coupe des vainqueurs de coupe face au RSC Anderlecht (2-0). A l’orée de la saison 1990-1991, l’attaquant Marco Branca (Udinese) et le milieu soviétique Alexei Mikhailichenko (Dynamo Kiev) sont engagés alors que Carboni et Muñoz font leurs valises. Avec ces nouveaux renforts, la Sampdoria va enfin remporter le scudetto, devançant les deux clubs milanais. De quoi faire oublier l’élimination en quarts de finale de la C2 et la défaite en finale de Coppa Italia contre l’AS Roma (1-3 ; 1-1).

Finale Coupe d’Europe des clubs champions 1992

Le climax européen

Quelques changements ont lieu dans l’effectif durant l’intersaison 1991. Mikhailichenko et Branca s’en vont. Ils sont remplacés numériquement par le brésilien Paulo Silas (Cesena) et Renato Buso (Fiorentina). Un peu plus tard dans la saison, le vieillissant Dossena s’en ira lui aussi. Malgré tout, l’ossature étant restée intacte, la Samp fait figure d’épouvantail pour sa première campagne en Coupe des Clubs champions. La saison débute bien, par une victoire en Supercoppa contre l’AS Roma (1-0). Malheureusement, les hommes de Boskov ne parviendront pas à bien figurer sur tous les tableaux. Si la campagne en C1 est bonne, le club plonge en championnat et se retrouve vite décroché après deux mois sans la moindre victoire. Ils finiront à une décevante sixième place en Serie A, à 28 points du champion. La campagne en Coppa Italia s’arrêtera elle en demi-finales contre Parme (0-1 ; 2-2). La Sampdoria atteint la finale de la C1 et croise le fer contre le FC Barcelone. Les blaugranas triomphent en prolongations grâce à un coup-franc de Ronald Koeman. Les génois finissent donc la saison sans le moindre titre majeur, une première depuis trois ans.

Ruud Gullit, David Platt et Roberto Mancini (de gauche à droite)

Le déclin

Cet échec en finale de C1 marque la fin d’une époque. Boskov rend le tablier et est remplacé par Sven-Göran Eriksson. Vialli quitte le club et rejoint la Juventus Turin. Toninho Cerezo, Paulo Silas et Pari partent également. Quatre ex-joueurs de la Juve sont enrôlés (Michele Serena, Nicola Zanini, Eugenio Corini et Mauro Bertarelli). Les autres recrues sont l’anglais Des Walker (Nottingham Forest), le yougoslave Vladimir Jugovic (Etoile Rouge Belgrade), Stefano Sacchetti (Modène) et Enrico Chiesa (Chieti) qui revient dans son club formateur. La saison ne sera pas une franche réussite malgré un Mancini en verve (15 buts en Serie A). La Samp finit à une modeste septième place et se fait éliminer de la Coppa Italia dès le premier tour par Cesena (2-1 ; 0-1). La saison 1993-1994 est marquée par les arrivées des ex-rossoneri Ruud Gullit et Alberigo Evani. L’anglais David Platt (Juventus Turin) rejoint également le club qui enregistre une vague de départs (Des Walker, Renato Buso, Zanini, prêts de Corini et Chiesa). Malheureusement, le club sera frappé par un drame. Le président Paolo Montovani décède le 14 octobre 1993. Son fils Enrico lui succède. La saison sera tout de même positive pour la Samp avec une nouvelle victoire en Coppa Italia contre Ancône (0-0 ; 6-1) et une belle troisième place en Serie A. Pour la première véritable saison d’Enrico Montovani comme président, l’intersaison est morose. Gullit retourne à l’AC Milan. Pagliuca rejoint l’Inter (Walter Zenga effectue le chemin inverse et le remplace dans les perches) et Katanec prend sa retraite. Les nouveaux arrivants (Sinisa Mihajlovic, Riccardo Ferri, Alessandro Melli) ne parviendront pas à les faire oublier. Même si Gullit revient en prêt au cours de la saison (échangé avec Melli), la Samp ne peut faire mieux que huitième en championnat. Eliminés prématurément de la Coppa Italia par la Fiorentina (1-2 ; 1-1), ils se font également sortir en demis de C2 par Arsenal.

Clarence Seedorf

La fin d’une ère

Après cette saison décevante, l’heure est au grand chamboulement. Eriksson reste en poste mais Vierchowod, Lombardo et Jugovic rejoignent la Juventus lors de l’intersaison. Platt et Gullit partent également. Malgré les arrivées de Christian Karembeu (FC Nantes) et Clarence Seedorf (Ajax Amsterdam) et le retour de prêt de Chiesa, l’effectif s’est clairement affaibli. Si Chiesa explose enfin (22 buts en championnat), le club finit à une triste huitième place. L’aventure en coupe d’Italie s’arrête également dès les seizièmes de finale. Le club perd Zenga (Padoue), Seedorf (Real Madrid) et Chiesa (Parme) durant l’intersaison et enregistre les arrivées de Juan Sebastian Veron (Boca Juniors), Pierre Laigle (RC Lens), Oumar Dieng (Paris Saint-Germain) et Vincenzo Montella (Genoa). Ce dernier suppléera admirablement Chiesa en devenant le buteur-maison (22 buts en Serie A) mais l’équipe ne décolle pas (élimination au premier tour de Coppa Italia, sixième place en championnat). Une page se tourne durant l’intersaison 1997. Eriksson rejoint la Lazio, emportant Mancini dans ses bagages. Cesar Luis Menotti lui succède sur le banc. Les deux recrues stars de l’intersaison Jürgen Klinsmann (Bayern Munich) et Giuseppe Signori (Lazio) ne convainquent pas. Si Alain Boghossian (Naples) s’impose, il n’en est pas de même pour le camerounais François Omam-Biyik (Atletico Yucatan). Par dessus le marché, Karembeu entame un bras de fer avec ses dirigeants pour rejoindre le Real Madrid (il aura gain de cause et partira fin 1997). Le club se fait éliminer de la coupe de l’UEFA dès le premier tour par l’Athletic Bilbao et quitte la Coppa Italia au second tour (battue par l’AC Milan). Malgré un Montella en feu (20 buts en championnat), la Samp finit neuvième.

Vincenzo Montella (Allsport UK /Getty Images)

La déchéance

En proie à des difficultés financières, le club ne peut retenir ses meilleurs éléments et doit vendre à tout va. Mihajlovic file à la Lazio. Veron et Boghossian rejoignent Parme. Signori quant à lui rebondit à Bologne. Malgré l’arrivée d’Ariel Ortega (Valence) et la présence de Montella, le club vivra une saison très difficile marquée par de nombreux changements d’entraîneurs (Luciano Spalletti puis David Platt avant que Spalletti ne fasse son retour) et une crise de résultats. Trop justes pour faire bonne figure (seulement neuf victoires en championnat), les génois finiront seizièmes et seront relégués en Serie B au terme de la saison après dix-sept ans dans l’élite. Les joueurs majeurs (Montella, Ortega et même le vieux fidèle Mannini) quittent le club durant l’intersaison. Le club ne remontera qu’en 2003 après quatre saisons au purgatoire. S’il s’est depuis stabilisé en Serie A (malgré une autre relégation en 2011), son glorieux passé est définitivement derrière lui.

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